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Publié le : 12/03/2021
Franck Riester : L’écosystème tech africain regorge de talents.
Depuis sa nomination en juillet 2020, dans le nouveau gouvernement de Jean Castex, en tant que ministre délégué chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité, Franck Riester enchaine les déplacements en Afrique. C’est comme une manière d’affirmer les priorités de son mandat qui consiste à repositionner la diplomatie économique française sur le continent, autour d’un triptyque : complémentarité des chaines de valeurs économiques, transition écologique et numérique. Pour cela, le chef de la diplomatie économique française s’appuie sur soutien fort de l’Elysée, qui met le continent au coeur de l’agenda diplomatique français. Pour parler de ces enjeux, Franck Riester a accepté de répondre aux questions de la Newsroom.
Le Président de la République a souvent été considéré comme le porte-drapeau de la « start up nation ». Comment ce tropisme pour l’entrepreneuriat et le numérique se manifeste dans la politique française de soutien au numérique sur le continent africain ?
Depuis son discours à Ouagadougou en 2017, le Président de la République porte une ambition forte pour renouveler notre relation avec le continent africain. Au cœur de ce projet, il y l’innovation et l’entreprenariat en Afrique. C’est un enjeu pour le développement économique des pays africains bien sûr, mais, au-delà, c’est aussi une opportunité de changer le regard que nos deux continents portent l’un sur l’autre. Il y a en Afrique un écosystème tech qui regorge de talents, un tissu entrepreneurial en pleine effervescence qui ne demande qu’à être accompagné pour poursuivre son développement : c’est aussi là que se joue l’avenir de notre relation.
»Par ailleurs, nous avons accompagné le développement de communautés French Tech dans 6 villes africaines. »
Franck Riester.
Aujourd’hui, l’entreprenariat africain souffre d’un important manque de financement. Nous voulons contribuer à y remédier. C’est l’objet de l’initiative Digital Africa, qui mobilise des moyens de l’AFD pour soutenir la croissance de la tech africaine : 65 M€ ont d’ores et déjà été engagés à ce jour sur un fond d’amorçage et sur des investissements de capital-risque. C’est aussi l’objet de l’initiative française Choose Africa, qui a pour objectif de déployer 3,5 milliards d’euros pour accompagner 16 000 TPE et PME africaines dans leur développement à l’horizon 2022.
Par ailleurs, nous avons accompagné le développement de communautés French Tech dans 6 villes africaines : Abidjan, Cape Town, Nairobi, Dakar, Casablanca, Tunis. Tous les jours, elles s’engagent pour fédérer et donner l’impulsion à leur écosystème local, elles font le lien entre les startups africaines et françaises, permettent la construction de collaborations et projets entre ces dernières et contribuent ainsi au développement de l’entrepreneuriat local.
D’après vous, quel rôle doit jouer le secteur numérique dans la politique d’aide au développement conduite par la France en Afrique ?
Là encore, certaines idées ont la vie dure car à bien des égards, le continent africain est en avance sur nous en particulier dans les usages du numérique. Je pense notamment au paiement par téléphone et à la bancarisation via les mobiles, qui a explosé avec la diffusion des smartphones par exemple.
Le numérique est un puissant levier de développement, à même d’offrir des opportunités concrètes à la jeunesse, et en particulier aux jeunes femmes du continent.
C’est la raison pour laquelle nous avons fait de la transformation digitale à la fois un moyen d’action de notre politique de développement en Afrique, et un objectif en soi. Nous sommes convaincus que l’innovation peut accompagner et accélérer la mise en œuvre des objectifs de développement durable, en particulier dans des secteurs prioritaires pour l’aide française comme l’éducation, l’égalité femmes-hommes, la santé ou le climat.
»Il faut donner aux pays d’Afrique les moyens de s’appuyer sur leurs propres forces pour bâtir leur avenir. »
Franck Riester
De façon plus générale, comment la diplomatie économique française compte s’inscrire dans le sillage de la réinvention de la relation avec le continent ?
A chacun de mes déplacements en Afrique, que ce soit au Maroc, en Afrique du Sud et bientôt au Nigéria, j’ai réaffirmé notre volonté de dépasser l’histoire, les frontières et les barrières de langue pour bâtir une relation économique nouvelle, fondée sur un partenariat renouvelé avec un accent particulier mis sur les secteurs clés pour l’avenir : l’agriculture, la ville durable, les nouvelles technologies, la santé. Sur tous ces sujets, il faut donner aux pays d’Afrique les moyens de s’appuyer sur leurs propres forces pour bâtir leur avenir.
Cela exige de nouer avec les pays d’Afrique des partenariats économiques de long terme et mutuellement bénéfiques. Cela exige également, de la part de nos entreprises, qu’elles soient toujours plus exemplaires et qu’elles mettent encore plus en avant ce qui les différencie de leurs concurrents : une responsabilité sociale et environnementale pleinement assumée, l’implication des talents africains et la création de valeur locale. Il faut aussi qu’elles osent se projeter dans les pays où la France est traditionnellement moins présente mais pourtant bienvenue et souvent attendue, je pense à l’Afrique anglophone.
Le multilatéralisme qui dessinera ‘’le monde d’après’’ sera écologique et numérique ou ne sera pas. Quelles recommandations donneriez-vous aux entreprises des deux rives pour qu’elles tirent pleinement profit de ce que l’on pourrait qualifier d’acte III de la mondialisation ?
Continuez à tisser des liens professionnels, à construire des partenariats industriels et à investir de part et d’autre de la Méditerranée ! Vous avez raison : le développement durable et la digitalisation sont aujourd’hui au cœur de notre ambition pour l’économie française et européenne. Ce sont également des priorités que nous portons pour nos échanges internationaux, en particulier avec l’Afrique.
Je suis également convaincu que développer les liens entre les chaines de valeur européennes et africaines contribuera à renforcer la résilience économique pour les deux continents. L’accord post-Cotonou ainsi que la modernisation des accords de partenariat économique déjà en place entre l’Union européenne et certains Etats africains sont autant de contributions à l’approfondissement de cette relation essentielle entre l’Europe et l’Afrique. Ce sont autant d’opportunités d’intégrer davantage le numérique, le développement durable, un meilleur accès aux marchés publics, la protection des investissements ou encore la protection de la propriété intellectuelle à nos échanges. Sur le long terme, notre intérêt stratégique partagé est de construire un accord commercial global qui rassemble nos deux continents autour d’échanges encore plus denses. A ce titre, nous soutenons la mise en place de la ZLECAf, la zone de libre-échange continentale africaine, qui établira à terme un véritable marché intérieur africain.
Ce sont autant de priorités dans lesquelles nous pouvons avancer ensemble pour une mondialisation plus juste, plus durable et plus équitable que la France soutient avec force.